AGRICULTURE - NARRATIF DE L'AGROCHIMIE

Le narratif de l'agrochimie à propos de l'agriculture est que les problèmes seraient d'abord et avant tout liés aux labours ainsi qu'au réchauffement climatique. Ce narratif vise à détourner l'attention des pesticides et à permettre la légitimation du recours aux nouveaux OGM (NGT), mais aussi aux semences hybrides F1, aux engrais mais surtout aux pesticides.
L'idée est de maintenir les agriculteurs dans une dépendance à l'agrochimie et aux semences brevetées pour des raisons économiques.

LES LABOURS, LE TRAVAIL DU SOL

Les arguments principaux utilisés contre les labours sont le déstockage du carbone du sol, la consommation de carburant par le tracteur lors du travail du sol qui émet des gaz à effets de serre, l'érosion et même la destruction la vie du sol. Pourtant cela fait des millénaires que nous labourons sans jamais avoir provoqué d'extinction.

LA DESTRUCTION DE LA VIE DU SOL

Les pesticides sont infiniment plus toxiques que les labours puisqu'ils sont créés pour tuer, qu'ils sont à l'origine d'un empoisonnement durable et persistant, par exemple lorsque des mychorizes sont arrachées lors d'un labour celles-ci recolonisent très rapidement le sol, là ou les pesticides persistent pour des siècles voire des millénaires. Les labours ne sont pas à l'origine d'un grand nombre de résistances ainsi que de la sixième extinction de masse et de la nette et rapide dégradation de la santé et de la fertilité de la population humaine.

PESTICIDES AGRICULTURE NARRATIF AGROCHIMIE
PESTICIDES AGRICULTURE NARRATIF AGROCHIMIE

On ne peut pas raisonner qu'en terme de sols, en silos : la biosphère est une et indivisible, tout est lié. Aussi, on a labouré pendant des millénaires sans que cela ait déclenché ni extinction de masse, ni empoisonnement global et persistant, ni résistance. On se demande comment les vers de terre et les champignons ont pu survivre  à des millénaires de travail du sol.

L'ÉROSION

L'érosion, souvent opposée comme étant favorisée par le travail du sol et les sols à nus, est pourtant naturelle sur les sols en pente. Pour y pallier, on construisait des terrasses et des murs de soutènement et on récupérait et remontait les sols, le mythe de Sisyphe figurant cette pratique ancestrale. On remonte d'ailleurs toujours les sols viticoles en Bourgogne.
Si on observe une érosion importante depuis quelques décennies, y compris sur les sols avec de très faibles pentes, c'est parceque l'on a transformé le sol en un substrat inerte avec les pesticides, et que les agrégats et l'humus des sols créés par les micro organismes, la micro, méso, macro et la méga faune ont disparu, ces derniers ayant été largement empoisonnés. Le sol se transforme en un bloc de sable plus ou moins inerte. 

Une baisse de la fertilité car si cela fait 12 000 ans que les paysans labourent, ça n'est pas par pur plaisir et par bêtise mais parce que la création d'un lit de semences favorable par les labours permet le bon enracinement des cultures, la circulation de l'eau et de l'air, ainsi que de réchauffer les sols. Cette circulation de l'eau ,de l'air et l'introduction de chaleur stimulent de surcroît de manière importante l'activité microbiologie qui favorise elle-même la levée, la croissance et l'implantation des plantes.

ET DES FAUSSES PISTES

Ainsi on incite les agriculteurs à faire de l'agriculture de conservation de sols (ACS), aussi appelée agriculture regenerative ou agriculture de précision ou carbon farming, à pratiquer des techniques de semis sous couvert et des techniques culturales simplifiées (TCS). Pourtant, les promoteurs des TCS reconnaissent eux-mêmes, qu'elles
provoquent une invasion d'adventices et la nécessité d'utiliser de fortes doses d'herbicides.

Ils affirment même qu'elles favorisent les parasites et les maladies des plantes, qu'elles rendent plus difficile la maîtrise des adventices et des organismes indésirables, qu'elles sont liées à l’utilisation du glyphosate car il n’existe pas de solution de remplacement et enfin que Ia concentration des pesticides en surface empêche la levée des cultures. Ils reconnaissent aussi que les TCS sont extrêmement techniques et nécessitent un équipement mécanique bien spécifique et coûteux, ce qui n'est pas pour déplaire aux vendeurs de machines agricoles ni aux banques agricoles.

PESTICIDES AGRICULTURE NARRATIF AGROCHIMIE
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DES IMPASSES TECHNIQUES

L'agrochimie désigne le travail du sol et les labours comme problématiques, car le non-labour mène à deux grandes impasses techniques:

L'impossibilité de désherber mécaniquement et donc l'obligation de désherber chimiquement avec des herbicides généralement du prosulfocarbe ou du glyphosate. Le prosulfocarbe est devenu le premier herbicide en France en 2022, le glyphosate étant de moins en moins efficace et de plus en plus d'herbes sauvages y devenant résistantes. Dans les pays où les OGM sont autorisés, le glyphosate reste maître avec l'utilisation des semences résistantes au glyphosate (appelée Roundup Ready). C'est donc le moyen le plus sur pour l'agrochimie de garder les agriculteurs captifs et dépendanst aux pesticides ainsi qu'aux semences Roundup Ready.

LE CARBONE DU SOL

Le non-labour prétend "
stimuler les processus biologiques naturels tout en augmentant la quantité de matière organique dans le sol et donc capturer du carbone dans les sols", mais encore faudrait-il ne pas empoisonner le sol avec des pesticides. En effet, la transformation vitale de la matière organique (biologique) morte en humus largue du carbone dans l'atmosphère et est donc émettrice de gaz à effets de serre. Mais ce genre de raisonnement biaisé omet de dire que cette matière organique morte a d'abord capturé l'équivalent carbone de ce qui est relargué lors de l'humifaction : ce qui est valable pour les arbres est valable pour les plantes, et que cette opération est donc neutre en carbone au global.

Le non-labour peut avoir un effet positif sur le carbone des sols dans certains contextes mais pas dans d’autres. La captation du carbone se révèle équivalente en labour et en non-labour. La communauté scientifique a mis du temps à s’en rendre compte car les travaux se sont d’abord surtout focalisés sur les premiers centimètres du sol qui, sous l’effet du non-labour, avaient effectivement une plus forte teneur en carbone. Mais cela s’accompagnait parfois d’une réduction du carbone du sol dans les couches plus profondes par rapport à des systèmes labourés où le carbone du sol est homogénéisé sur 20 ou 30 cm de profondeur.

PESTICIDES AGRICULTURE NARRATIF AGROCHIMIE
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Le non-labour a donc surtout un effet sur la redistribution du carbone dans le profil de sol, sans conduire à une augmentation nette du stock sur son ensemble, ce qui est nécessaire quand on s’intéresse à l’atténuation du changement climatique.

Pourtant de nombreuses plateformes collectent déjà des supposés crédits carbone auprès des agriculteurs pour les vendre ensuite à des entreprises polluantes comme Air France qui se revendiquent donc neutres en carbone. Il s'agit de pure greenwashign puisqu'aucun carbone supplémentaire n'a été capturé. Ces calculs simplistes reposent sur des raisonnements faux et sur aucune mesure réelle, mais sur des modèles qui n'ont aucun sens pour les raisons évoquées précédemment, mais aussi parceque le vivant est bien trop complexe et non prédictible pour faire des calculs corrects.

Et bientôt, "grâce" à l'Intelligence artificielle, par manque d'humilité et de connaissance du vivant , on nous promet toutes sortes de merveilles. En attendant, cela permet aux agriculteurs de s'enrichir (comme l'agrivoltaïsme et la méthanisation) pour acheter toujours plus de pesticides et de semences dégénérées, et à l'industrie de continuer à polluer, mais avec bonne conscience. Ces plateformes sont déjà très nombreuses: GreenFlex, Carbioz (Crédit Agricole), France Carbone Agri, MyEasyFarm, ReSoil, EcoAct, Cargill RegenConnect, etc.

Enfin, l'agrochimie a polarisé le débat autour du travail du sol, comme s'il n'existait qu'un seul type de labour et de travail du sol.
Il y a toutes sortes de travail du sol puisqu'il y a toutes sortes de situations. Chaque sol est différent, chaque situation est différente, chaque micro-climat est différent, chaque lieu à une histoire différente, chaque agriculteur est différent, chaque culture est différente et, en conséquence, il n'y a pas une seule et unique bonne réponse.

PESTICIDES AGRICULTURE NARRATIF AGROCHIMIE
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La bonne réponse en agriculture est ; "Ça dépend !", sauf pour les pesticides.
S'il est possible de ne pas travailler le sol pour certaines cultures en maraîchage lorsque l'on plante des plans par exemple, ça n'est pas vrai pour les semis directs et les grandes cultures. Dans certaines régions froides, au climat défavorable, travailler le sol et désherber aide à le réchauffer à la sortie de l'hiver. Certains sols supportent mieux les labours que d'autres. C'est très complexe. Aussi n'imaginez pas qu'avant on ne travaillait pas le sol moins souvent ou moins profondément. Ce qui est certain c'est que le recours au labours à grande échelle était moins systématique et plus réfléchi.

On entend maintenant de plus en plus parler d'agriculture biologique de "conservation" (ABC) : le mélange des genres et la propagation du doute et du flou à son maximum. Quand on sait que l'agriculture de conservation a été construite par l'agrochimie en opposition à l'agriculture biologique, cela est très problématique. Même l'agriculture biologique est contaminée, voire cannibalisée, par des pratiques issues de l'agrochimie. Pourtant, en grandes cultures, pour les raisons expliquées précédemment, cela est extrêmement difficile. Ceux qui s'y essayent, sauf conditions exceptionnelles de terroir et de météo, en reviennent et se remettent à travailler leur sol. C'est principalement en maraîchage, et là aussi en conditions très favorables et sur certaines cultures, que le non-travail du sol est possible. Et c'est d'ailleurs beaucoup par le maraîchage, notamment sur sol vivant et des vers de terre, que cette supposée "problématique" autours du travail du sol est introduite.

Les pesticides ont donc tué à la fois tous ceux qui y sont sensibles, mais pas certains pathogènes dont la présence est là encore renforcée par l'extermination de leurs prédateurs également exterminés par les pesticides. Les boucles de rétroactions sont très nombreuses et la spirale alors créée est infernale. En clair, ils ne reste que ce qui est devenu résistant et il n'y a donc plus de solution. On augmente la toxicité, la diversité et les modes d'action des pesticides dans une course infernale menant à l'extinction.

Ces résistances sont observées pour l'ensemble des cultures, des élevages et même des humains. Si les rendements commencent à baisser c'est d'abord et avant tout pour ces raisons et c'est valable chez nous mais aussi ailleurs comme sur café, le chocolat, le piment : il s'agit d'un phénomène global. Le réchauffement n'est pas la cause principale mais peut être un facteur aggravant et est là aussi exacerbé par nos pratiques désastreuses.

PESTICIDES AGRICULTURE NARRATIF AGROCHIMIE
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LE CHANGEMENT CLIMATIQUE

L'augmentation des pathogènes, bactériologiques, fongiques (champignons) et des animaux (souvent des insectes) est régulièrement attribuée au réchauffement climatique par "erreur" ou plutôt parfois par méconnaissance ou par malhonnêteté intellectuelle. Comme expliqué , cela est aussi une des stratégies principales de l'agrochimie.

Si les pathogènes augmentent c'est parce que les pathogènes servent à réguler les écosystèmes déséquilibrés. Leur présence en grand nombre sont un indicateur du mauvais état de santé des écosystèmes. En uniformisant les variétés de nos cultures sur de grandes surfaces nous les avons favorisés. En uniformisant de surcroît les individus à l'intérieur de ces variétés avec un appauvrissement en variabilité génétique proche du clonage, nous avons augmenté l'impact des pathogènes et des événements météorologiques puisque ces individus sont tous sensibles aux mêmes maladies et événements météo. Cela s'est donc accompagné d'une utilisation toujours plus importante de pesticides.

HYBRIDES F1, OGMs & NGTs 

Par ailleurs, si on estime que le réchauffement est le problème, au lieu de l'empoisonnement global et des cultures dégénérées et inadaptées comme le maïs, il devient alors absolument nécessaire de développer des OGMs/NGTs ou à tout le moins des semences hybrides F1 qui résistent aux canicules et aux sécheresses.

Les semences OGMs et/ou NGTs ne sont pas un danger en soi pour la santé, mais elles sont problématiques car, tout comme les semences hybrides F1, elles sont la propriété des semenciers. Ces semences ne sont pas stériles au sens reproductif (bien qu'elles soient stérilisées des germes pathogènes d'où la confusion récurrente), mais c'est surtout qu'il est interdit de les reproduire puisqu'elles sont sous brevet des fabricants. Ainsi les agriculteurs n'ont pas le droit des les reproduire. Ils doivent racheter éternellement de nouvelles semences.

Enfin ces semences, qui s'apparentent à des clones, sont des semences dégénérées qui n'ont que très peu de capacité de résistances aux maladies et aux variabilités climatiques par absence de diversité génétique. Ce manque de biodiversité ne fait qu'augmenter les problèmes des agriculteurs les faisant enter dans une spirale infernale d'un besoin toujours plus important de pesticides.

PESTICIDES AGRICULTURE NARRATIF AGROCHIMIE
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Pour ce qui est des sécheresses qui s'accentuent avec le réchauffement climatique, elles sont bien réelles mais là encore nos mauvaises pratiques en exacerbent de manière massive les effets. Les zones humides, les marais, les prairies et les champs humides ont largement été drainés pour êtres cultivés. Et on s'étonne aujourd'hui de leur assèchement. On cultive des plantes extrêmement gourmandes en eau l'été, comme le maïs, très peu adaptées à notre climat puisque chez nous l'été, qui est la saison chaude, est aussi la saison sèche, alors que ces plantes tropicales et subtropicales proviennent de régions où la saison chaude est la saison (très) humide.

Si les gels tardifs font beaucoup de dégâts, là aussi, c'est parce qu'on a cherché à allonger les plages de production, et favorisé des variétés toujours plus précoces, là encore sans diversité tant variétale qu'intra-variétale puisqu'il s'agit de clones bouturés ou greffés.